Depuis sa fondation, l’Église de Corneville sur Risle a subi de nombreuses modifications. Placée sous le vocable de Saint Sébastien, elle semble avoir une origine très ancienne. C’est en effet à partir du IXème que les églises consacrées à Saint Sébastien ont dû être construites.
Selon un rapport en date du 5 juillet 1877, M. Perré, Architecte, écrit que le portail et le mur de la nef sont de style roman des XIème et XIIème siècles; la nef a été reconstruite au XVIème siècle et les fenêtres transformées en «ogives».
Avant 1789, selon un rapport daté du 14 août 1835 et signé CAPELLE, desservant Corneville, «l’Eglise était dans un très triste état de réparation extérieure et de décoration intérieure vu qu’il y avait une seconde église y attenante celle des chanoines réguliers qui desservaient en même temps la paroisse et qui ne faisait avec solennité et régularité les offices que dans leur église conventuelle, d’où il arrivait que l’Église de la paroisse était dans l’abandon.»
Entre 1822 et 1824, les travaux suivants ont été effectués:
- réalisation d’un plafond au-dessus de la nef
- réparation de l’escalier du clocher
- reconstruction de la tourelle.
Entre 1831 et 1835, la «Fabrique» de Corneville a financé:
- la réparation de la couverture de l’église et du clocher
- la réparation de la couverture détruite par un ouragan le 15 février 1833
- l’agrandissement d’une fenêtre
Entre 1877, M. Perré, Architecte, oeuvrant pour la commune a fait un estimatif des travaux à effectuer pour la «reconstruction» de l’église et prévoyait notamment:
- la restauration du mur sud «menaçant ruine sur une longueur de 10,25 m.»
- la suppression du plafond en bois délabré et son remplacement dans la nef par une voûte appliquée contre la charpente
- la modification de la charpente avec suppression des sommiers. La dépense est alors estimée à 5 700 Francs.
Il est également précisé que l’ancienne muraille Sud a «cédé aux dépressions naturelles qui s’opèrent alors vers la vallée». Ceci a entraîné une «lézarde» de 6 m de long et de 8 m de haut et un faux aplomb de35 cm. Au milieu de ce mur, un contrefort a cédé.
Le cahier des charges établi à cette occasion précisait que le mur extérieur devait être reconstruit en pierre de taille de 0,30 m d’épaisseur montée au mortier de chaux avec rejointement ciment et prévoyait une maçonnerie de remplissage avec parement à l’intérieur en cailloux et moellons provenant de la démolition. Epaisseur 0,65 m. Enfin, le parement intérieur devait être enduit «en plâtre et mortier».
Entre 1877 et 1882, rien n’a été fait, M. Limare refusant que les matériaux soient entreposés dans sa propriété jouxtant l’église. Finalement cela s’est terminé par une expropriation (tour échelle).
En mai 1882, il est procédé à l’adjudication des travaux et parallèlement M. Perré, Architecte, est remplacé par M. Leclerc.
En août 1882, l’Architecte dans un rapport précise que le «mur qu’il était prévu de conserver est en mauvais état et dangereux.» Finalement, il est décidé de reconstruire le mur Sud jusqu’au cœur avec des contreforts en briques.
De plus, il est constaté que le pignon formant portail est en mauvais état et qu’un contrefort d’angle s’est écroulé entraînant une partie lézardée du pignon.
- D’enlever les contreforts de façade du pignon et de reconstruire deux contreforts d’angle en pierre.
- D’agrandir la porte d’entrée
- De défoncer l’arcature aveugle.
- D’ouvrir une rose
- De doubler les moises de la charpente
- De reconstruire une voûte simulant une voûte en maçonnerie.
L’estimation de la dépense est alors de 12 224, 15 francs.
En août 1883, les travaux suivants ont été effectivement réalisés:
- Réfection totale du mur Sud de la nef
- Réfection d’une partie du mur Nord de la nef
- Reconstruction partielle du pignon Sud
- Redressement du mur Nord: consolidation
- Construction d’un bâtiment pour la charité
- Réfection du plancher
- Réfection d’une moitié de la couverture, pose de gouttières et tuyaux de descente.
Restent alors à exécuter:
- Divers travaux de finition (enduit, réfection du tombeau de la donatrice des biens communaux, carrelage, pose de parquet et lambris, réparation de la chaire, peinture etc…)
- Total des travaux exécutés: 25 645, 54 F
- Total des travaux restants: 7 271, 40 F
- Frais divers: 12 082, 97 F
- TOTAL 44 998, 91 F
En décembre 1999, la tempête a découvert une bonne partie du clocher. La remise en état imposait la mise en place d’un échafaudage. Le Conseil Municipal considérant l’état de vétusté de l’ensemble a profité de l’occasion pour faire recouvrir la totalité du clocher.
L’histoire de cette propriété inséparable de l’église et de l’ancien presbytère a des racines très profondes dans l’histoire de la région. Lors de l’invasion normande, Corneville fit parti du grand domaine cédé à Torf qui fut le premier seigneur de Pont-Audemer. Corneville possédait alors plusieurs moulins dont certains furent cédés aux monastères voisins, les Préaux en 1050, le Bec Hellouin en 1217.
Au XIIIème siècle, l’archevêque de Rouen, Eudes Rigaud, fit 9 visites à Corneville sur Risle. Il constate que les chanoines mènent une vie relâchée: les malades sont mal soignés, les dettes s’accumulent et les bâtiments ne sont pas entretenus.
En 1287, la foudre détruit l’église, le réfectoire et presque tous les bâtiments, y compris les archives. L’abbaye se reconstruisit et fut ensuite mêlée à la guerre de cent ans. Le roi d’Angleterre Henri V en confisqua le temporel (soit l’ensemble des biens de l’abbaye). En 1419, l’abbé Jean II dut faire hommage à Henri V, c’est-à-dire se déclarer son vassal pour que l’abbaye récupère ses biens. (en février 1420)
Corneville possédait une abbaye fondée en 1143 par Gislebert (Gilbert) de Corneville, seigneur du lieu qui donna son propre manoir et deux acres de terre pour installer le monastère primitif. Au cours des siècles, cette abbaye disparut après diverses vicissitudes, il n’en reste aujourd’hui que quelques vestiges, dont une partie du cloître, incluse dans deux propriétés particulières.
La légende veut que pendant la guerre de cent ans, les cloches disparaissent. Deux versions existent pour expliquer cette disparition:
- Sur les conseils des moines, plusieurs garçons du village décrochèrent les cloches (pour les soustraire aux envahisseurs anglais) et les ensevelirent dans la Risle. Ces garçons furent tués à la guerre et les moines ne livrèrent pas le secret.
- Pendant la guerre de cent ans, les Anglais, Maîtres de Normandie, pillèrent l’abbaye de Corneville sur Risle; ils chargèrent le trésor et les cloches dans une barque pour les emmener au fil de la Risle, dans leur camp retranché. Mais le poids considérable des cloches fit chavirer l’embarcation. Les moines récupérèrent le trésor et les cloches, sauf une que l’on ne retrouva jamais, et, dit la légende, lorsque les cloches de l’abbaye sonnèrent à nouveau, celle restée au fond de la Risle répondit au carillon.
Clairville et Charles Gabet pour le livret, Robert Planquette pour la musique s’inspirèrent de cette légende pour créer cette célèbre opérette «Les Cloches de Corneville» dont la première représentation eut lieu le 19 avril 1877 à Paris:
«L’action se passe à Corneville à la fin du règne de Louis XIV. Le vieux marquis de Corneville compromis dans une conspiration a dû s’expatrier avec son petit-fils Henri, pendant vingt ans. Avant son départ, il a confié la gérance de ses biens à son fermier, Gaspard, paysan rusé et avare, dont Serpolette, une enfant trouvée, est la servante. Le vieux Gaspard qui a fait siennes toutes les propriétés du marquis, fait courir le bruit que le château est hanté la nuit par des fantômes, pour jouir en paix des trésors qu’il a accumulés. Par ailleurs, la jeune Germaine, comtesse de Lucenay, (le comte de Lucenay s’étant expatrier lui aussi, avait confié à Gaspard sa fille Germaine)dont il a fait disparaître l’acte de naissance, est, dit-il sa nièce. Mais le nouveau bailli, plus perspicace que le précédent, devine la supercherie; aussi, pour le gagner à sa cause, Gaspard lui promet-il la main de Germaine. Grenicheux, pêcheur opportuniste et sans scrupules, convoite Germaine et la fortune de son oncle, sans cependant être insensible aux charmes de Serpolette. Mais Germaine a juré de n’épouser que celui qui, il y a deux ans, l’a sauvée de la noyade…»
- Le premier était bien entendu la fonte des fameuses cloches
- Le deuxième, la préparation de la cérémonie qui, en 1900, devait marquer la venue de ces dernières à Corneville.
- Le troisième, une idée fixe du marquis de la Rochethulon, consistait à faire de la manifestation provinciale quelque chose de plus large, de plus international, c’est-à-dire de faire coïncider en temps et en esprit les fêtes de Corneville avec les tendances pacifiques de l’époque et plus particulièrement avec les premières séances de la Conférence de la Paix à la Haye. D’ailleurs La Rochethulon insista sur cette tendance et n’hésita pas à intituler sin carillon «Le Carillon de la Paix Universelle». Or, avant que les fonds aient été assurés, dans l’enthousiasme des premières souscriptions, la fonte fut décidée à la fonderie des frères Paccard à Annecy-le-Vieux.
Le 7 octobre 1900, une grande fête fut organisée à Corneville sur Risle pour l’arrivée des cloches, on estime à 6 000 le nombre des visiteurs. Banquet, kermesse, restaurants, théâtre, rien ne fut négligé.
A l’occasion de cette fête, le Marquis de la Rochethulon présenta les douze cloches avec leur nom de baptême, le poids de chacune et la sonorité qui leur était affectée:
- La Normande, 181 kg, ré
- La Canadienne, 132 kg, mi
- La Danoise, 110 kg, fa
- La Russe, 78 kg, sol
- La Suédoise-Norvégienne, 57 kg, la
- L’Américaine, 39 kg, Si
- L’Algérienne, 33 kg, do
- L’Anglaise, 23 kg, ré
- La Savoie, 17 kg, mi
- La Sainte Germaine, 15 kg, fa
- L’Auvergne, 11 kg, sol
- La Crétoise, 7 kg, la
En 2003, le carillon est classé Monument Historique.